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Paulette Jaladieu
11 juillet 2012

Paulette à Paris

La tante Dorothée, la sœur de papa, avait trouvé un commerce à Paris pour mes parents.

Ils vendirent tout, biens, commerces et même les meubles pour l’acheter. C’était une affaire très moche dans le XIII°.  

Grâce au directeur de la Dépèche de Toulouse, mon père trouva une place aux Grands Régionaux à Paris, boulevard des Italiens à côté de l’Opéra et de la Madeleine.

Dans cet établissement on vendait des journaux mais comme c’était le début des phonographes, l’immense salle était équipée de phonographes avec des écouteurs. Il y en avait une trentaine et moyennant un jeton, les gens pouvaient écouter les dernières chansons à la mode.

On y vendait aussi des billets pour les grands théâtres Parisiens.

Il y avait des femmes aux caisses pendant la journée mais le soir li n’y avait que mon père jusqu’à deux ou trois heures du matin.

Il faisait aussi l’homme de peine, il s’occupait du chauffage et du nettoyage.

 

Avant que nous partions pour Paris, ma grand mère voulut réunir tous ses enfants et petits enfants.

Comme elle craignait que ma mère ne me fasse pas aller au catéchisme à Paris, elle alla trouver le curé de Blaye puis elle me fit venir de Sète en Avril et décida que je ferai ma communion au mois de Mai.

J’ai eu une éducation religieuse express (un mois en tout).

Pour ma première communion, mon oncle Maurice Coustenoble avait acheté un appareil de photos. C’était un des premiers sur le marché avec un trépied.

Il photographia tout les filles, famille par famille avec tous les cousins.

Toutes ses filles et petits enfants, soit : Camille avec Henri et Paulette (moi ), Alice avec Germaine et Paul, Daly avec Georges, Rachel avec Robert, René et Reine, Angèle avec Lucienne et la dernière Marthe.

Marie et Pierrot Maraval n’étaient pas encore nés.  

                                                   communion maman

 

Au moi de mai, au lieu d’aller à Paris je partis pour un an à Lille, ensuite mes parents vendirent l’épicerie et prirent une librairie, rue de Jessaint.

C’était une bonne affaire et je revins chez mes parents.

                                                   maman7

 

Les contacts avec mon père furent difficiles. Nous ne nous connaissions pas. Ce fut difficile pour moi mais sûrement pour lui aussi. Je l’ai compris plus tard. J’avais entre onze et douze ans.

Dès mon arrivée à Paris je suis enfin allé régulièrement à l’école mais j’avais beaucoup de retard. J’ai tout de même eu la chance d’avoir de très bonnes institutrices qui m’ont bien aidé.

J’ai passé mon certificat d’études a 14 ans. Comme j’étais trop âgée pour intégrer l’école supérieure, je m’inscrit à l’école commerciale.

Durant les années 1925 à 1932, tous les ans l’oncle Maurice Coustenoble ou mon père nous emmenait passer les vacances à Carmaux pendant deux mois.

Tout d’abord chez mes grands parents à La Grillatier. Après le décès de mon grand père Marty, ma grand mère quitta la grande maison et s’en alla vivre chez sa fille Marthe.

Et ainsi je passais les vacances chez les Bonnafous. Henry, mon frère plus âgé ne vint plus.

L’année de la mort de mon grand père, nous sommes restés à Paris pour nos vacances.

Henry qui avait 16 ans, pris une place de livreur chez un grand fourreur, place Vendôme.

Il gagnait beaucoup d’argent, grâce aux pourboires, aussi, à la rentrée il ne voulut pas revenir à l’école. A sète, il était bon élève mais arrivé à Paris il fut handicapé par son accent du sud.

De plus, comme il n’y avait pas d’enseignement de l’espagnol, on lui imposa l’allemand et cela ne lui a pas plu.

Alors mon père lui proposa de partir travailler. Il décida de devenir coiffeur. Mon père lui trouva une place d’apprenti. Il travaillait deux jours par semaine et prenait des cours du soir.

 

 

C’était l’époque des garçonnes et les femmes ont commencé à se faire couper les cheveux et à se faire friser au fer chauffé au gaz.

Pour ne pas payer des modèles, il s’exerçait sur moi et sur mon amie de l’époque Lili Toucheneder, une réfugiée Polonaise, très jolie et très blonde.

Qu’est-ce qu’il nous a brûlé comme cheveux !

La rue de Jessaint et la rue de la goutte d’or étaient déjà des quartiers de réfugiés et d’immigrés. Nous, nous venions du Tarn et de l’Aveyron, les autres venaient d’Europe centrale. Eux étaient juifs, nous autres cathos, mais si peu que cela ne faisait pas beaucoup de différence.

Les parents de Lili faisaient des retouches pour des tailleurs dans des pièces sombres.

Un jour, Lili m’y a fait entrer car comme tous les jeudi elle aidait ses parents à coudre des doublures. A partir de ce jour, pour m’amuser, j’ai fait comme elle car ma mère qui était couturière de formation, m’avait appris à coudre correctement. Nous allions quelquefois livrer les paquets. Je me souviens qu’avec les quelques francs que nous avions gagné, nous nous étions payées un tissu et ma mère nous avait confectionné deux jolies robes à fleurs dont nous étions très fières.

Le quartier était pauvre ; Il y avait aussi des maisons clauses et beaucoup de prostituées.

Nous vivions une jeunesse bien innocente au milieu de tous ces gens qui nous connaissaient et nous protégeaient discrètement.

Mon père travaillait énormément.

Nous n’avions pas la radio, alors, nos seules informations dépendaient des journaux.

Nous vendions environ 2000 journaux par jour à la librairie de la rue de Jessaint, en particulier le Petit Parisien, l’Intransigeant et Paris Soir. Avant de les livrer, il fallait les plier en quatre.  

Donc tous les matins, avant le départ à l’école, nous allions au magasin plier les journaux.

Il n’y avait pas de voiture pour aller chercher les livraisons.

Les journaux étaient déposés dans des cafés. Le notre était à environ 1 kilomètre de chez nous. Il fallait y aller entre 4 heures et 5 heures du matin, car on ouvrait le magasin à 6 heures. C’était mon père qui allait chercher les journaux. Il les portait les paquets dans de grands sacs en tissus noir. C’était un travail pénible. Il quittait son travail aux grands régionaux, tous les soirs à minuit. Il allait se coucher puis il se levait à 4 heures du matin pour aller chercher les journaux pour le magasin.

Un hiver, mon père est tombé malade. Alors, comme mon frère Henry avait du mal à se lever la nuit, c’est moi qui l’ai remplacé avec ma mère. La première nuit ma mère était rentrée avec les épaules toutes écorchées, alors mon père nous a acheté une voiture d’enfant pour porter les paquets. Ma mère allait chercher les journaux au café et moi les publications hebdomadaires chez Hachette, juste à coté. Ma mère ne voulait pas me voir au café car il n’y avait que des hommes. Par contre chez Hachette, les gens étaient très gentils. Ils me faisaient passer devant et me protégeaient car j’étais une gosse de 14 ans à peine.

La librairie occupait le rez-de-chaussée de la rue de Jessaint. Il y avait un tout petit escalier qui conduisait à l’appartement au premier étage. Une porte séparait le magasin de l’appartement, avec au dessus une lucarne qui nous permettait de surveiller le magasin sans être vue.  

Tous les jours , à midi, en rentrant de l’école je me mettais au comptoir et ma mère montait à l’appartement pour préparer le repas. En suite elle descendait et je montais manger.

L’appartement était constituée d’une petite cuisine, une salle à manger et deux chambres. Le tout avec des fenêtres donnant sur la rue. J’aimais bien rester au magasin. Je lisais tous les illustrés. Les clients habituels prenaient les journaux tous seuls, posaient la monnaie sur une sous coupe près de la caisse. Le plus souvent, absorbée par ma lecture, je ne levais même pas la tête pour les regarder. C’est pourquoi mon père qui n’appréciait pas mon comportement, me surveillait par la lucarne au dessus de la porte de l’escalier.

Un jour, un homme qui me parut déplaisant est entré dans la boutique et m’a demandé des lacets pour ses chaussures. Or je savais que pour prendre les lacets, je devais me tourner et me baisser derrière le comptoir. Comme l’homme avait une canne à la main, j’ai eu une certaine inquiétude et je lui dit que je n’avais plus de lacet. A cet instant je cru entendre un pas dans l’escalier, alors de peur de me faire gronder, j’ai dit au client : «  Attendez ! je vais voir » et je me suis tournée et baissée au moment où l’homme levait la canne sur moi. A cet instant, mon père est arrivé, comme un fou et il a mis l’homme dehors. Je n’ai pas eu très mal mais j’ai eue très peur. J’ai compris que si mon père me surveillait, c’était surtout pour me protéger.

 

Un été, entre 1928 et 1930, j’avais donc entre 13 et 15 ans et alors que j’étais en vacances à Carmaux, il a fallu que je rentre d’urgence à Paris car ma mère venait d’être hospitalisée.

Mon oncle m’a accompagné à la gare de Vindrac avec la voiture Gaston Bonafous.

J’ai pris seule le train et après un changement, je suis arrivé à Paris ou mon père m’attendait.

Pendant un mois, je me suis occupée toute seule du magasin. Je le fermais à une heure pour rendre visite à ma mère à l’hôpital Lariboisière. Elle avait fait une hémorragie, suite à une fausse couche et elle était très affaiblie. Les infirmières m’ont aidé et me consolaient.

C’est à cette époque que j’ai eu un problème avec la magasin. Nous vendions aussi des tabliers, des chemisiers et des articles divers. Maman avait pour clientes les dames des maisons closes. Un jour, l’une d’elle est venue dans le magasin et m’a demandé des chemisiers. Alors moi, croyant bien faire, comme le faisait ma mère, je lui ai prêté tout un choix de robes. Je n’ai jamais revu ni les robes, ni l’argent. Mes parents ne m’ont pas grondé, au contraire ils m’ont consolé.

Un jour, mon père me proposa, soit de rester à l’école, soit de tenir le magasin avec eux. Comme j’ai choisi de continuer l’école, mes parents ont vendu la librairie de la rue de Jessaint.

Pendant trois ou quatre mois, nous avons été en appartement à Belleville puis ils ont acheté au 43 rue Caulincourt, un tout petit magasin de confiserie et de chocolat fin que ma mère pouvait tenir toute seule. Nous l’aidions, seulement pour les fêtes à remplir les boites de chocolat car à cette époque les fabricants livraient les chocolat en vrac suivant la qualité et c’était le commerçant qui devait faire les assortiments et fermer la boite avec un jolie ruban. C’était très agréable. Je gouttais tous les chocolats et les pattes de fruits.  

Au bout de 3 ans, Je sors de l’école commerciale avec la sixième place de ma promotion.

Je fis une année supplémentaire pour acquérir diverses spécialités et je rentrai dans le monde du travail.

                                                  maman6

 

Ma première place ne fut guère brillante, j’étais très sauvage.

Trois mois plus tard, l’école me proposa une place aux assurances sociales dans la section allocations familiales. Le travail n’était pas très intéressant par rapport à mon niveau d’études mais il fallait bien commencer.

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